Le(s) plus ancien(s) document(s) des archives

Le document original le plus ancien conservé aux archives d’Armentières date de 1387. Quasiment intact, il est rescapé des incendies, des sièges, des troubles révolutionnaires et des deux conflits mondiaux.

 

Ce parchemin, coté GG 12, date du 7 novembre 1387. Il est décrit ainsi dans l’inventaire des archives anciennes « église paroissiale, sentence des bailli et hommes de fief d’Armentières assignant sur treize cents de terre provenant de Jeanne Traitrelle la rente que celle-ci avait constituée au profit de l’église paroissiale pour la fondation d’une torse de chire pesant six libvres à offrir tous les ans le jour de Pâques et l’achat de quatre aulnes de blanc drap que les ministres de l’église donneront, chaque année, à la Noël, à telle personne pauvre native d’Armentières qu’il leur plaira. »

 

 

Archives municipales d'Armentières, GG 12.

 

 

Ce document, inestimable par son ancienneté, n’a toutefois que peu de conséquences sur l’histoire de la ville puisqu’il s’agit d’une donation à l’église, évènement somme toute assez courant pour l’époque. Un autre document, presque aussi ancien, brille davantage par l’importance et l’impact qu’il a eu sur l’histoire de la ville.

 

Il s’agit de la charte dite de Jean Sans Peur, cotée HH 5, et datée du 3 novembre 1413. Ce parchemin, en relativement bon état de conservation, était autrefois muni d’un sceau en cire, qui s‘est détaché depuis.

 

Par cet acte, Jean, duc de Bourgogne et comte de Flandre, accorde à la ville d’Armentières le privilège d’organiser chaque année une franche foire qui s’étend sur trois jours, pour récompenser la ville d’être une notable seigneurie. Les franches foires sont des marchés exonérés de tout impôt. Les marchands peuvent alors y vendre leur production sans payer de taxe. Si un personnage aussi important que Jean Sans Peur s’intéresse à Armentières, c’est qu’elle revêt une certaine position dans la région.

 

Cette foire est une aubaine pour la ville qui attire alors les marchands et tisserands venus de Béthune, Lestrem et parfois même de Paris, du Havre et de Marseille pour y vendre leurs pièces de toile, nappes et serviettes et pour s’approvisionner. La foire devient très célèbre et très active. Elle est tellement en vogue que, accordée pour trois ans, elle est prolongée et agrémentée de musique. Les comptes de 1596 mentionnent en effet le paiement de 12 livres à trois ménestrels pour jouer à l’hôtel de ville.

 

Armentières devient un important centre de commerce du drap et en découle dans les siècles suivants le développement du négoce et de la fabrication de la toile de lin puis de l’industrie textile. Et c’est ainsi que la ville obtient sa renommée de « cité de la toile ».

 

 

Archives municipales d'Armentières, HH 5.

 

 

Voici la transcription de la charte :

 

« Jehan, duc de Bourgoingne, comte de Flandres, d’Artois et de Bourgoingne, palatin, seigneur de Salins et de Malines. Savoir faisons a tous presens et a venir que, comme les bonnes gens, eschevins, manans et habitants de la ville d’Armentières nous ayent humblement exposé que ycelle ville, qui de tout temps a esté et est une notable seignourie en laquelle plusieurs marchans ont acoustumé de conserver pour y exercer fait de marchandise, soit assise sur la rivière du Liis, par quoy les marchans d’icelluy nostre pays et autres y pevent mener et faire mener et conduire leurs denrées et marchandises assez aisement quand bon leur samble, et il soit ainsi que, pour augmenter et acroistre ladicte ville, lesdiz exposans ayent désir et affection de y avoir chascun an une franche feste, a laquelle tous marchans avec leurs biens, denrées et marchandisespeussent venir et demourer certain temps durant franchement et seurement pour y vendre, acheter et marchander, ce que faire ne se pourroit se de nostre grace ne leur estoit sur ce pourveu, si comme ils dient, requerant humblement icelle ; pourquoy nous, inclinans a ladicte supplication, ces choses considérées et sur ycelles eu advis et deliberation avec aucuns des gens de nostre conseil, par lesquels avons trouvé que leur ottroyer ladicte francge feste ne povons avoir aucun dommage ains puet estre le bien, prouffit et utilité de la chose publicque, aux dessus nommez exposans avons, en faveur mesmement et pour contemplacion de nostre très chier et très amé frère le duc de Brabant et de Lembourc, qui très instanment nous a prié et requis, ottroyé et consenti, ottroyons et consentons, en leur donnant pour nous, nos hoirs et successeurs congié et licence de grace especial par ces presentes, que doresnavant chascun an perpetuelment ilz puissent faire tenir en ladicte ville une franche feste par trois jours, commencans le neufyesme jour de may, a laquelle pourront venir y vouldront pour illec acheter des denrées et marchandises teles que bon leur semblera, les enmener seurement et sauvement en payant les devoirs et droitures pour ce deus et acoustumez, y estre, sejourner et demourer ladicte feste durant deux jours devant ledit neufyesme jour et deux jours après, lesquelx marchans et autres bonnes gens ensamble leur or, argent, biens, denrées, marchandises, varlez, facteurs, familiers et mesnies (domestique) quelconques, nous, en leur donnant pour nous, nosdiz hoirs et successeurs bon, seur et sauf conduit, avons prins et mis, prenon et mettons par cesdictes presentes en et soubz nostre protection et sauvegarde especial, exceptez toutesvoyes les bannys, ennemis ou fugitifs de monseigneur le roy, de nous, de nostredit pays et conté de Flandres, et ceuls qui seroient obligiés és foires de Champagne et de Brie, en corps, en biens ou en leurs propres personnes. Si donnons en mandement par ces mesmes presentes a tous noz justiciers et officiers de nostredit pays et conté de Flandres, presens et ad venir, leurs lieuxtenans, et a chascun d’eulz endroit soy et si comme a lui appartendra, que ces presentes, au vidimus desquelles fait soubz seel authentique voulons plaine foy estre adioustee, ilz publient et denoncent et facent publier et doncier, chacun d’eulz es mettes de son office, et du contenu en ycelles eulx et pareillement tous autres qui ce peut et pourra touchier facent, seuffrent et laissent les dessus nommez en et par la manière que dit est plainement et paisiblement joïr et user, sanz a eulx ne aussi auxdis marchans, leurs denrées, faùiliers et mesnies faire ne souffrir estre fait, ores ne pour le temps a venir, aucun destroubier ou empeschement au contraire, ains s‘aucun empeschement leur estoit fait ou mis, si l’ostent ou facent oster chascun d’eulx incontinent et remettre a estat deu. Car ainsi nous plaist et le voulons estre fait, non obstans quelxconques ordonnances, mandemens ou deffenses a ce contraires. Et affin que ce soit ferme chose et estable a tousioirs mais, nous avons en tesmoinf de ce fait mettre nostre seel a cesdictes presentes, sauf en autres choses nostre droit et l’autrui en toutes. Donné en nostre ville de Lille, le IIIe jour de novembre l’an de grace mil quatre cens et treze. »

 

 

Archives municipales d'Armentières, HH 5, détail.

 

 

Source : chronique des archives n°144 de mai-juin 2011.

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